Je viens de finir l’Elu, qui n’est pas sans me rappeler, par certains aspects, « je m’appelle Asher Lev » du même auteur. J’ai lu ce dernier il y a maintenant bien 5 ans et j’en garde un excellent souvenir. C’est pourquoi je vais vous présenter ces 2 livres aujourd’hui… D’où la longueur de ce billet…
L’Elu parle de 2 petits garçons, Reuven et Danny, juifs tous les 2 et habitant à 5 blocs l’un de l’autre, à Brooklyn.
Ils ne se sont jamais rencontrés, et pour cause : Danny vient d’une famille de Hassidiks, des gens très pieux, vêtus de noir sur des chemises blanches, aux papillotes de cheveux à la rabbi Jacob enroulées autour des oreilles. Les personnes de cette communauté restent entre eux et ne se mélangent pas aux autres communautés juives qu’ils méprisent d’une certaine manière. Danny est le fils du Rabbin de cette communauté, l’homme le plus important. Son avenir est tracé : il lui succédera, comme c’est le cas depuis des générations dans cette famille de Rabbis.
Reuven, le narrateur de l’histoire, appartient quant à lui à une communauté juive plus ouverte même si très pratiquante. Pas de codes vestimentaires, pas d’interdictions d’écouter la radio ou de lire des livres autres que la torah ou le talmud. Son père est aussi un sage, un homme qui sait beaucoup de chose et croit en la religion tout en restant ouvert.
Sur fond de seconde guerre mondiale, ces garçons qui n’auraient jamais dû se rencontrer, se retrouvent à disputer un match de baseball l’un contre l’autre. Danny envoie la balle droit au visage de Reuven qui se retrouve à l’hôpital pendant une semaine sans savoir si il va perdre un œil ou pas… Quand Danny lui rend visite, ce qui avait commencé par une haine sans nom va se transformer en une forte amitié.
J’ai beaucoup aimé ce livre. Cette amitié entre ces 2 garçons si différents et dont les pères ne partagent pas les même avis, est très touchante. Tout comme les relations pères/fils : Danny et son père, qui ne se parlent jamais à pars quand ils étudient le Talmud. Reuven, lui, parle de tout avec son père, qui est toujours là pour l’écouter, le conseiller… Danny est un génie, qui aimerait être psychologue mais qui doit devenir Rabbin. Reuven, doué pour les maths et que son père pousse à être prof, veut devenir Rabbin.
Les relations sont compliquées, les questionnements omniprésents, l’amour, la peur, les silences, la croyance d’avoir raison et les autres tort, l’incompréhension, le savoir… autant d’éléments qui font que l’on ne peut qu’apprécier ce live…
Je m’appelle Asher Lev, parle d’Asher, petit garçon juif hassidique qui développe un don artistique fabuleux dès l'âge de 4 ans. Il aime peindre, il voit le monde à travers ses yeux d’artiste. Mais voilà, peindre et tout ce qui touche à cet art, est une abomination pour le père d’Asher. Il n’aura pas le droit de dessiner.
Ce livre parle de chemin chaotique, de son déchirement entre la peinture et la tradition, du dilemme d'Asher, qui ne sait pas trouver sa place entre sa religion/sa culture, et son don/ sa passion…
Ah, que ce livre est beau. Touchant. Incroyablement bien décrit et écrit. On comprend le bouleversement de ce garçon, on l’accompagne, on le soutient, on a envie de l’aider à s’imposer face à son père, face à sa communauté. Et puis on a de la peine également pour ses parents qui ne comprennent pas. Et comment comprendraient-ils ? ce n’est pas comme ça qu’ils ont été élevés, ce n’est pas ce qu’on leur appris, c’est tout ce qu’ils n’ont jamais vu, connu. Pourquoi leur enfant est-il différent ?
Ces deux livres se ressemblent : dans les deux on suit des enfants qui sont élevés d’une certaine manière, avec des règles strictes, mais qui au fond d’eux ne se retrouvent que partiellement dans leur monde, dans leur éducation.
Dans les 2 livres on suit l’évolution de ces enfants et de leurs façons de pensées. Leur peur d’assumer ce que leurs proches rejettent. La peur d’accepter leur différence au risque de devoir renier une partie d’eux-mêmes, car ils savent que faire un choix, c’est perdre une partie de qui ils sont, de leurs identités…
Les deux fois, on est touché de voir ces parents qui sont sûrs d’avoir raison, et on se surprend à ne pas leur en vouloir, à les comprendre, même si on n’adhère pas à leur façon de voir les choses. Car finalement, ils aiment leurs enfants. Ils sont persuadés d’agir pour le mieux et dans l’intérêt de leurs fils.
Il y a des ressemblances dans la thématique, mais j’ai été plus touchée par « je m’appelle Asher Lev » qui dépeint beaucoup plus les émotions de l’enfant et des parents.
Si la plume de Chaim Potok est magnifique dans ces 2 livres, si j’ai eu le cœur serré aussi bien à la lecture de l’un que de l’autre, et que des larmes ont coulé les deux fois, je crois que j’ai été plus bouleversé par l’histoire d’Asher.
L’Elu était par moments très intéressants, mais moins touchantes, comme ces chapitres sur l’étude du Talmud, où des paragraphes sont décortiqués et analysés par les fidèles, qui ont atteint un certain niveau pour pouvoir comprendre ces écrits. Ce livre nous plonge encore plus que le premier dans la vie de ces communautés, dans leur quotidien, dans leur façon de pensée, limitées.
C’est intéressant, très, mais d’une certaine manière on s’identifie moins et on se sent un peu plus étrangers à ce monde…
En bref, j’ai passé un très bon moment en lisant l’Elu mais ce n’est pas un coup de cœur comme mon premier livre de cet auteur, que je ne serais que trop vous conseiller.
Quelle que soit votre croyance ou votre absence de croyance d’ailleurs, vous ne pourrez qu’être touchés par ces livres, qui soulèvent des questions profondes et touchantes et universelles.
Un auteur que je vous somme de découvrir en tous cas, quel que soit le livre par lequel vous commencerez !
A noter qu'il y a une suite à "je m'appelle Asher Lev" qui est "le don d'Asher Lev" : tout aussi bien d'ailleurs !